Des sondages hors de prix aux sujets désopilants. D’après le militant écologiste grenoblois Raymond Avrillier, qui tenait une conférence de presse hier après-midi, l’Elysée a commandé durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy pour 9,4 millions d’euros de sondages et études, dont l’intérêt pour la République et pour la France reste à démontrer.
«Islam». Exemple : en février 2011, alors que DSK caracolait dans les sondages pour la présidentielle, l’Elysée faisait réaliser les siens, et interrogeait les Français en ces termes : «Diriez-vous que DSK se situe très à gauche, à gauche, au centre gauche, etc. ?» ou «Diriez-vous qu’au cours de cette émission DSK vous a paru avoir changé en bien ?» Ce sondage avait été réalisé suite à l’intervention du patron du FMI au journal télévisé de France 2. En 2008, c’est Carla Bruni qui préoccupait l’Elysée : «Que pensez-vous du mariage possible [de Nicolas Sarkozy] avec Carla Bruni ?» Un autre sondage, cette même année, interroge : «Pour chacune des personnalités suivantes diriez-vous qu’elle ferait un(e) bon(ne) candidat(e) à l’élection présidentielle ?» énumérant uniquement des personnalités du Parti socialiste.
D’autres sondages, plus récents, portent sur une intervention télévisée de Marine Le Pen, sur l’électorat écologiste ou encore sur «les sympathisants socialistes et la question de l’islam». «Je ne remets pas en cause le fait que l’Elysée commande des sondages, mais c’est leur démesure et la thématique des sondages réalisés qui posent problème», explique Raymond Avrillier, que l’on a coutume de surnommer «le tombeur du système Carignon».
Sur plus des 300 sondages et études commandés durant le quinquennat, 66 l’ont été entre début 2010 et le 30 avril 2012 pour un montant de 3,04 millions d’euros. Et pourraient avoir aidé le candidat et non le Président. Le paiement de ces sondages par de l’argent public constituerait donc un délit, d’après le militant. «Il s’agit du financement par une personne morale [l’Elysée, ndlr] de la campagne électorale de Nicolas Sarkozy, ce qui représente un délit puni par le code électoral», a-t-il détaillé. Avrillier a ainsi indiqué avoir saisi la Commission nationale des comptes de campagne pour qu’elle intègre une partie des sondages commandés par l’Elysée dans les comptes de campagne du candidat Sarkozy. Cette demande est aujourd’hui à l’étude.
Raymond Avrillier a également porté plainte auprès du procureur de la République de Paris. «Le 6 juin prochain, Nicolas Sarkozy va perdre son immunité présidentielle, cela permettra peut-être qu’une enquête judiciaire soit ouverte, explique-t-il. J’ai déjà déposé une plainte avec constitution de partie civile, mais jusqu’à maintenant, aucune procédure ne pouvait être déclenchée du fait du statut du chef de l’Etat.»
Citoyen. Le militant écologiste s’était déjà battu pour obtenir, le 17 février, la liste des sondages commandés entre 2010 et 2012. Il avait dû saisir en 2009, en tant que simple citoyen, le tribunal administratif de Paris, qui avait enjoint la présidence de la République de communiquer ces pièces. Par ailleurs, Avrillier affirme ne pas avoir reçu les bons de commandes de sondages «indirects» commandés par l’intermédiaire des cabinets d’études Publifact (la société de Patrick Buisson), Publiopinion et Giacometti Péron. Des cabinets d’études qui n’ont jamais été mis en concurrence comme le prévoit la loi. Ces prestations ont été facturées 2,98 millions d’euros au total à Publifact et Publiopinion, et 1,38 million à Giacometti Péron. La plainte déposée par Avrillier auprès du procureur porte aussi sur ces faits.
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