«Je ne vous ai pas invité à l’Elysée, je n’ai pas demandé de faire une émission spéciale.» Sur le plateau de France 2, attendant comme n’importe quel invité la fin du JT, François Hollande livrait sa première interview de président de la République, deux semaines après son entrée en fonction. Et s’applique à se montrer comme le chef d’Etat «normal» et accessible que le candidat PS avait promis d’être. Ne cessant de marquer sa différence avec son prédecesseur, dont il ne cite jamais le nom, comme à son habitude.
«Faire simple». Sur la gouvernance, sur son image de chef de l’Etat, il joue l’avant-l'après. Avant, Nicolas Sarkozy allait à Bruxelles en avion, accompagné d’un second appareil de secours? Désormais, le Président prend le train à l’aller, la voiture au retour. «Pas médiocre, pas banal [...], être exemplaire», pose celui dont l’une des premières décisions a été de baisser de 30% son salaire et celui de ses ministres.
Alors qu’on avait reproché à Sarkozy, en 2007, son style bling-bling, éloigné de la stature et de la sobriété qui conviennent à la fonction, Hollande a campé celui qui trouve d’emblée ses marques, pour s’y être «préparé pendant des mois». «Je ne suis pas un Président en transition, je suis un Président en action», se complimente-t-il après avoir décliné son agenda de la dernière quinzaine (rencontre avec Angela Merkel, sommet de l’Otan, G8, sommet informel de l’UE, visite éclair en Afghanistan). Pas impressionné pour un sou de côtoyer les dirigeants du monde: «Il ne peut pas y avoir d’intimidation dans un pays pour celui qui représente la France.»
«Majorité claire, solide, cohérente»
Sur l’international aussi, le Président entend afficher sa spécificité. Hollande a rappelé sa promesse de campagne, réaffirmée à Kaboul et sur la base militaire de Kapisa vendredi: «Il n’y aura plus de troupes combattantes en Afghanistan d’ici la fin année» même si la coopération civile doit se poursuivre jusqu’en 2013. Revenant sur sa décision, prise ce mardi, d’expulser l’ambassadrice de Syrie en France après le massacre de Houla, il n’a pas exclu une intervention militaire contre le régime Assad, dans le cadre d’une «délibération du Conseil de sécurité» de l'Onu. C’est-à-dire avec le feu vert de la Chine et de la Russie, dont il va tenter de convaincre le président, Vladimir Poutine, en France vendredi. Sur le couple franco-allemand, Hollande suggère un rééquilibrage: «Il y a la nécessité d’une amitié entre France et Allemagne qui puisse entraîner les autres mais nous avons besoin des autres.» Le Président français se montre particulièrement optimiste sur ses chances de s’accorder avec la chancelière: «Sur les eurobonds, elle ne dit pas 'jamais', elle dit 'pas tout de suite'.»
Concernant le dialogue social et la répartition des rôles entre l’Elysée et Matignon, Hollande vante également un «changement de méthode» et la «démarche de la concertation», le jour de la première rencontre entre Jean-Marc Ayrault et les partenaires sociaux. Alors que Sarkozy avait taxé François Fillon de «collaborateur» les premiers mois de son quinquennat, Hollande veut montrer qu’il laisse son Premier ministre prendre les commandes des dossiers sociaux et s'il confirme un coup de pouce au Smic, refuse d'en fixer l'ampleur par avance.
C’est au nom de cet équilibre entre les institutions qu’il promet de ne pas s’impliquer dans la campagne des législatives: «Je ne suis pas le Premier ministre, je ne suis pas le chef de la majorité.» Il a tout de même conclu en demandant aux Français de faire gagner son camp les 10 et 17 juin. «S’ils veulent ces réformes-là, s’ils m’ont choisi, je pense qu’ils auront à coeur d’accorder une majorité claire, solide, cohérente au président de la République.»
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